En zone euro, fort déstockage à prévoir pour les entreprises
Dans leur nouvelle étude commune, Euler Hermes et Euler Hermes Rating se penchent sur le niveau anormalement élevé depuis mi-2018 des stocks des entreprises européennes. Le ratio stocks sur nouvelles commandes augmente partout dans le monde, mais il croît de manière bien plus prononcée en zone euro : il a atteint 1,13 en mars 2019, son plus haut niveau depuis 2012. Pour comparaison, la moyenne mondiale en la matière est inférieure à 1.
- En mars 2019, le ratio stocks sur nouvelles commandes des entreprises européennes a atteint un nouveau pic, son plus haut niveau depuis la crise de 2012, loin devant le reste du monde.
- L’incertitude mondiale et une mauvaise anticipation de la demande par les entreprises expliquent 30% de cette hausse. Euler Hermes estime que le niveau des stocks en zone euro est actuellement entre 20 et 30% supérieur à un niveau qui serait considéré comme normal..
- Selon Euler Hermes, le fait que le ratio stocks sur nouvelles commandes ait autant dévié de sa trajectoire normale pourrait conduire à une baisse de l’inflation de -0,2 point en 2019 et -0,1 point en 2020. De plus, en zone euro, le niveau anormalement élevé des stocks des entreprises pourrait coûter -0,3 point de croissance de PIB (+1,2%).
Des stocks anormalement élevés depuis mi-2018
Le ratio stocks sur nouvelles commandes augmente de manière constante en zone euro depuis fin 2017. Dans le secteur manufacturier, le nombre de jours de mobilisation des stocks (DIO : Days Inventory Outstanding), qui indique combien de jours il faut à une entreprise pour convertir ses stocks en ventes, a augmenté de +4 jours en 2018 par rapport à 2017. Une situation qui touche autant les grandes entreprises (+4 jours à 52 jours) que les PME (+4 jours à 58 jours). Les grandes entreprises espagnoles (+11 jours) et les PME italiennes (+9 jours) ont subi les plus fortes hausses. En France, les DIO des PME ont augmenté de +4 jours à 56 jours alors qu’ils ont baissé de -3 jours pour les grandes entreprises (à 51 jours).
Une accumulation de stocks due à l’incertitude mondiale et aux activités de veille
Selon Euler Hermes, l’accumulation de stocks dans les entreprises européennes depuis mi-2018 est due à deux facteurs principaux :
- L’incertitude mondiale : les grandes entreprises européennes sont de plus en plus exposées au commerce international et à ses variations. Secoués par de nombreuses incertitudes (accords commerciaux remis en cause, tensions sino-américaines), les échanges commerciaux ont ralenti depuis le début de l’année, entrainant un accroissement des stocks des entreprises.
- La mauvaise anticipation de la demande par les entreprises : anticipant une demande plus élevée, les entreprises ont accru leur production. Finalement, la demande étant plus faible que prévue, les stocks ont augmenté à des niveaux au-dessus de la moyenne.
Ces deux facteurs expliquent, à eux seuls, 30% de la hausse des stocks constatée au T1 2019.
Quel impact sur la croissance et l’inflation en zone euro ?
La majorité des entreprises européennes du secteur manufacturier interrogées par la Commission Européenne en juin 2019 estiment que leur niveau de stocks est trop élevé. Or, avoir des stocks trop importants est coûteux pour les entreprises (manque de place, allocation des ressources financières, etc). Ainsi, lorsqu’elles se retrouvent dans cette situation, elles cherchent généralement à réduire leurs stocks en baissant les prix ou en réduisant leur production.
Vu l’état de leurs stocks, les entreprises européennes du secteur manufacturier devront forcément ajuster leur rythme de production. « En zone euro, la tendance est clairement à la baisse de la production, mais c’est le secteur des biens intermédiaires qui devrait souffrir le plus. En effet, dans ce segment, la production devrait baisser de -3% y/y d’ici le T3 2019 », décrit Ana Boata, économiste Senior en charge de l’Europe chez Euler Hermes.
Selon Euler Hermes, l’accumulation des stocks en zone euro devrait engendrer un recul de l’inflation de -0,2 point en 2019 et -0,1 point en 2020. Un impact sur la croissance européenne est également attendu, de l’ordre de -0,3 point en 2019 (+1,2%). En France, l’impact sur la croissance du PIB devrait être de -0,2 point.