Sécuriser les infrastructures critiques : le deux en un de l'investissement vert

15/07/2024

Dans un monde où les tensions géopolitiques augmentent et où le changement climatique s'intensifie, les infrastructures critiques sont particulièrement exposées au risque de perturbation. 

Au sommaire :

  • Des événements récents ont montré à quel point l'industrie, l'énergie et les services de transport peuvent être vulnérables aux conflits ou aux dommages causés par des vagues de chaleur, des inondations, des tempêtes et des sécheresses de plus en plus fréquentes. Près de 85 % des marchandises échangées dans le monde sont transportées par des porte-conteneurs, mais les tensions en mer Rouge ont bloqué le Canal de Suez, une voie navigable vitale pour le commerce entre l'Asie et l'Europe. En conséquence, les coûts de transport ont augmenté de 92 %. Dans le même temps, la fluctuation du niveau des eaux menace les transports terrestres et les ports sont de plus en plus menacés par les inondations côtières. Par ailleurs, l'approvisionnement en énergie est également menacé, car les centrales électriques et les pipelines peuvent faire l'objet d'attaques physiques ou de sabotage, tandis que les sécheresses, les inondations et les tempêtes pourraient également entraîner des pannes d'électricité généralisées et des interruptions d'activité, menaçant à la fois la sécurité nationale et la stabilité économique mondiale. Les dommages directs causés par le changement climatique s'élèvent à eux seuls à 30 milliards d'USD par an dans les pays à revenu élevé et à 18 milliards d'USD dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.
  • Dans ce contexte, la prime de risque géopolitique augmente à la fois pour l'assurance et les investissements. À la fin de l'année dernière, les primes d'assurance contre les risques de guerre en mer Rouge ont augmenté jusqu'à 1 % de la valeur du navire, contre 0,07 % avant la guerre entre Israël et le Hamas. Même les compagnies qui réorientent leurs navires pour éviter la zone paient un prix plus élevé pour les trajets plus longs. De même, les marchés financiers ont réagi en exigeant des rendements plus élevés alors que le paysage de l'investissement dans les infrastructures est confronté simultanément aux risques géopolitiques, à l'inflation, aux mouvements des taux d'intérêt et à une période globale de volatilité et de sensibilité accrue.
  • Mais les gouvernements, les investisseurs et les institutions supranationales ont la possibilité de travailler sur la prévention. En effet, les coûts d'adaptation sont moins élevés que les coûts d'atténuation et la résilience peut être renforcée tout en investissant dans la transition verte. Après des années de sous-financement qui ont accéléré le vieillissement des infrastructures et créé des inefficacités, le vent semble tourner. L'UE a pris des mesures pour renforcer la résilience des infrastructures, d'abord dans le contexte de la transition verte avec les plans associés au Green Deal européen et, plus récemment, avec le plan REPowerEU, en mettant l'accent sur la sécurité énergétique. Cela a non seulement stimulé les projets dans les domaines de l'énergie éolienne, solaire et de l'hydrogène (en particulier en Allemagne, en France et en Espagne), mais a également conduit à la modernisation du réseau. La présence accrue d'investisseurs privés et le regain d'intérêt pour les partenariats public-privé (PPP) vont également dans ce sens. La transition climatique est la clé qui permettra d'accroître encore les investissements dans les infrastructures, car la résilience peut être mise en place parallèlement aux initiatives vertes, sans coût supplémentaire important. Selon Global Infrastructure Hub, le déficit de financement pour les investissements dans les infrastructures en Europe est estimé à 1,5 trillion de dollars, sur la base des besoins en infrastructures (10,6 trillions de dollars) et des tendances actuelles en matière d'investissement.
  • Mais tout n'est pas qu'investissement direct : les changements réglementaires qui encouragent les investissements dans les infrastructures peuvent également avoir un impact significatif. L'Autorité bancaire européenne et l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles pourraient (encore) ajuster les exigences en matière de capital pour rendre les investissements dans les infrastructures plus attrayants en termes de charges de capital ou favoriser l'inclusion de lignes directrices ESG dans leurs décisions de prêt et d'investissement. Les obligations vertes de l'UE pourraient également jouer un rôle plus important en stimulant les investissements dans les infrastructures à travers l'Europe, car leur nature syndiquée s'aligne parfaitement sur l'utilisation des projets d'infrastructure transeuropéens. En général, la promotion du financement mixte, que ce soit directement (par l'effet de levier ou l'extension de programmes existants, de garanties) ou par la création de cadres réglementaires clairs qui fournissent des règles du jeu plus précises, pourrait constituer une avancée significative pour combler le déficit d'infrastructures (vertes).